Pop-Up Songbook
Pop-Up Songbook alterne extravagance et sérénité. Pour la première fois, Hauert utilise la voix humaine – life, enrégistrée et samplée. Hauert et ses danseurs expérimentent intensément l’équilibre et la gravité : par exemple, dans une longue séquence, les interprètes essaient les mouvements les plus variés, debout sur une jambe.
Interview de Marianne Van Kerkhoven (Kaaitheater):
Dans Pop-Up Songbook, nous avons travaillé avec des voix ; des voix qui chantent des chansons, qui expliquent le mot “chanson” dans le titre ; nous l’avons appelé Songbook parce que le spectacle consiste en une collection de courtes pièces qui, bien que reliées, sont aussi autonomes : un concert, un livre de chansons. Le terme Pop-up désigne les livres dans lesquels les personnages se déploient au fur et à mesure que vous les ouvrez et deviennent tridimensionnels. La bande sonore, réalisée par Bart Aga et Alex Fostier, consiste en un enregistrement de nos propres voix électroniquement manipulées et samplées. À plusieurs moments de la représentation, nos voix sont traitées en direct par l’ordinateur et déformées. Les mots et le contenu des chansons (sur l’amour, la beauté du monde) ne sont pas si importants, il s’agit plutôt de leur matérialité, leur sonorité.
Pour Pop-Up Songbook, nous cherchions principalement la relation entre la voix et le corps : comment utiliser sa voix ? Comment mettre en condition notre corps afin d’en obtenir la meilleure résonance ? En tant qu’interprètes, nous avons l’habitude de nous tenir debout sur scène, mais nous ne sommes pas des chanteurs professionnels ; nous avons surtout recherché notre propre “son” honnête et authentique, notre voix “nue” : nous ne nous cachons pas derrière un personnage dramatique mais nous nous montrons tels que nous sommes.
Tout comme dans ma précédente création Cows in Space, nous utilisons dans Pop-Up Songbook une combinaison de matériel strictement structuré et improvisé. Nous ne considérons pas l’improvisation comme un outil à utiliser uniquement pendant les répétitions ; elle est aussi intégrée dans les performances. C’est parce que je suis convaincu que par l’improvisation, le corps peut arriver à des schémas de mouvement très complexes, auxquels on ne pourrait jamais penser isolément. Dans l’improvisation, il faut oser aller jusqu’au bout, bien au-delà de cette limite où l’on répète les mouvements que notre corps connaît.
En ce qui concerne la structure, nous avons travaillé sur le principe des lignes parallèles ; en plus des mouvements individuels de chaque danseur, on travaille les relations des uns avec les autres, et le groupe devient un sixième corps ; tout comme les orbites des corps célestes sont reliées les unes aux autres. Nous avons développé ces lignes parallèles dans douze directions à partir des douze chiffres de l’horloge. Les danseurs choisissent des directions différentes sur cette base : la forme et la formation de l’ensemble du groupe est donc en constante évolution. Il y a aussi une section dans laquelle nous travaillons avec équilibre et gravité en restant debout sur une jambe pendant longtemps. Nous réinvestissons dans cette pièce le matériel que nous avons trouvé pour Cows in Space en examinant les possibilités cinétiques de chaque articulation de notre corps : quels sont les mouvements articulaires possibles lorsque vous êtes debout sur une jambe ?
Dans mes recherches, je veux aussi rendre visible l’espace entre les danseurs, créer un champ magnétique entre eux, comme s’il y avait un corps souple en mouvement entre eux. Et que cet espace soit perceptible par le spectateur. Dès le début de mon travail chorégraphique – même quand j’étais encore à l’école à Rotterdam – je travaillais à relier entre eux, par exemple, un triangle équilatéral, un carré et un cercle dans le parcours suivi par les danseurs ; cela a produit un effet étrange et fascinant, une “couche” qui s’est insérée sous le chorégraphie. Dans ma période Rosas (Hauert a travaillé sur les créations de Erts, Mozart Concert aria’s et Kinok avec Anne Teresa De Keersmaeker) j’ai aussi travaillé sur le parcours suivi par les gens du film de Dziga Vertov L’homme à la caméra et j’ai essayé de le reconstruire sur scène.
Mon travail est axé sur la recherche. Le travail sur la voix que nous avons commencé dans Pop-Up Songbook sera certainement exploré plus en profondeur dans un projet ultérieur. En outre, je veux aussi me pencher sur le contenu dramatique de la qualité du mouvement et sur sa dimension théâtrale.
Concept & direction Thomas Hauert
Chorégraphie, danse & chant Sara Ludi, Mark Lorimer, Mat Voorter, Samantha van Wissen, Thomas Hauert
Lumière & scénographie Simon Siegmann
Composition originale & son Bart Aga & Alex Fostier
Coach voix Rahel Studer
Production ZOO/Thomas Hauert
Coproduction Springdance, Utrecht (NL)
Support: Ministerie van de Vlaamse Gemeenschap / Vlaamse Gemeenschapscommisie / Pro Helvetia / SACD (Programme “1500 heures pour la danse”) / Rencontres chorégraphiques internationales de Seine-Saint-Denis
Remerciements Kaaitheater, Nathalie Douxfils, Pascale Gigon, Aliocha Van der Avoort, Cie. Pierre Droulers et Dirk Bikkembergs